IntroductionLégende de St GeorgesLégende de Gilles de ChinLe Dragon occidentalLe Dragon orientalSt Georges@DoudouDragon@Doudou

AU CONFLUENT DE DEUX MYTHES
Marcel-Etienne Dupret
Historien et Archéologue

De nos jours, l'image de saint Georges qui prévaut dans l'imaginaire collectif et dans les rituels folkloriques subsistants est celle du cavalier bardé de fer qui s'élance contre le dragon, le transperce de sa lance et le terrasse avant de délivrer une princesse éplorée.

C'est le héros chevaleresque dont la Légende dorée de Jacques de Voragine, écrite vers 1290, nous a retracé la geste. Pourtant, ce n'est pas sous cet aspect que la tradition littéraire et figurée du saint s'est d'abord constituée, car sa figure immensément populaire a connu de nombreux avatars, qui soulignent à la fois sa richesse symbolique et la pérennité de son succès.

C'est sous les traits d'un soldat martyr de la foi que Georges fait son apparition au Vème siècle dans l'hagiographie chrétienne - d'abord orientale - avec d'emblée une remarquable prolifération de variantes légendaires, Originaire de Cappadoce, ce tribun militaire se convertit brusquement au christianisme et encourt de ce fait la colère de l'empereur, perse ou romain selon les cas.

Il subit sept années durant une hallucinante série de tortures, sans que jamais sa volonté ne soit brisée par le tyran aussi aveugle qu'obstiné.

Et pendant ce temps, miracles et conversions se multiplient à l'envi, escortés d'une kyrielle d'exécutions particulières ou collectives qui sanctionnent la ferveur dont Georges fait l'objet (l'épouse de l'empereur elle-même subit le martyre pour être devenue chrétienne). En fin de compte, le saint sera efficacement décapité et montera en gloire auprès de Dieu, tandis que dans un mouvement inverse ses bourreaux seront consumés par un feu ardent tombé du ciel.

De cette première narration, textuelle ou imagée, se dégage la figure d'un martyr superlatif, athlète ou soldat du Christ par excellence et de ce fait intercesseur de choix auprès des puissances de l'au-delà.

C'est sous cette forme que le culte de saint Georges prendra son essor fabuleux à travers le monde chrétien, jusqu'à ce que l'irruption du dragon et de la princesse vienne superposer au récit initial une nouvelle strate de significations et de potentialités symboliques. Celles-ci prendront alors le devant de la scène, faisant passer la première trame au second plan sans jamais l'abolir, notamment en Orient.

Il faut observer que le caractère manifestement fabuleux du martyre décrit plus haut a suscité très tôt de sérieuses réserves de la part des autorités ecclésiastiques pour cette raison, le supplice de saint Georges se voit exclu des actes sincères des martyres par le décret pseudo-gélasien du Vlème siècle,


tandis que Jacques de Voragine souligne que sa légende a été mise au rang des pièces apocryphes dès le deuxième concile de Nicée (787). Mais cette méfiance ne devait pas nuire au succès populaire du héros chrétien, bien au contraire.

Aucune version "officielle" de sa vie et de ses actes ne venant canaliser ou (dé)limiter le champ de son expansion, la figure de Georges se prêtait mieux que celle de tout autre saint à une multiplication sans entraves des significations symboliques, à un foisonnement exubérant des représentations plastiques - aux confins parfois de l'orthodoxie strictement chrétienne.


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